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Le cinéma premier (ou primitif) recouvre la période pré-classique durant laquelle domine le « tableau » (plan large, frontal et horizontal, incluant l’intégralité de l’action, et enchaîné dans un montage strictement successif). Cette catégorie inclue les films à tableaux purs (~ jusqu’en 1908) et les films ultérieurs qui commencent déjà à intégrer quelques principes du cinéma classique (plans rapprochés, montage), mais qui conservent encore le plan large comme valeur de base. (1893-10′)
À noter que la période est aussi celle de la « vue » documentaire, qui partage certaines caractéristiques avec le tableau (plan large, unitaire, sans montage), mais qui n’est ni totalisante (la vie la traverse, elle ne prélève qu’un fragment du réel), ni systématiquement frontale.
Prague 1820. Balduin, étudiant sans le sou, vend l’image de son reflet dans un miroir à un énigmatique usurier. Il devient alors riche, mais son reflet vit sa propre vie, au point de prendre le pas sur la sienne. Un jour, alors qu’il est provoqué en duel suite à sa vie dissolue, Balduin voit le père de l’opposant l’implorer de ne pas aller jusqu’au bout…
Paul Wegener (1874-1948) est l’un des nombreux cinéastes allemands formés dans la troupe de Max Reinhardt, dont il fut l’un des plus célèbres comédiens. Il réalise une dizaine de films marqués par l’horreur et le fantastique, dont deux furent fondamentaux pour le cinéma allemand : L’Étudiant de Prague, grand succès critique et public qui en lance en quelque sorte le coup d’envoi, et qui préfigure certains aspects (notamment thématiques) de l’expressionnisme ; et Le Golem (1920), qui en est justement l’un des films les plus emblématiques. Mais Wegener restera surtout attaché au théâtre, et ce jusqu’à l’après seconde guerre mondiale, où il participe activement à reconstruire la vie culturelle de Berlin.
Stellan Rye (1880-1914) est l’un des nombreux talents danois qui rejoignirent l’Allemagne au cours des années 10 – cinéma danois dont il rapporte certains traits, comme le goût du tournage en extérieur. Après L’Étudiant de Prague, qu’il conçoit de concert avec Paul Wegener et Hanns Heinz Ewers (le scénariste), il devient l’un des cinéastes les plus actifs et prometteurs du jeune cinéma allemand, mais voit sa carrière fauchée par la première guerre mondiale, où il meurt prisonnier de guerre.
Allemagne / 1h25 / Imdb / DVD Titre original : Der Student von Prag
Poursuivie par une bande de conspirateurs, une jeune femme se réfugie dans un cinéma et regarde le film Cabiria. Elle décide de réclamer de l’aide à l’homme fort de ce film, Maciste, et le recherche dans les studios de la société de production Itala Films…
Luigi Romano Borgnetto (1881-1957), peintre de formation, travaille chez Itala Films à partir de 1907, notamment comme décorateur. Ses impressionnantes constructions pour Cabiria (Pastrone, 1914) lui ouvrent les portes de la série Maciste, dont il co-réalisera plusieurs épisodes. Il finit sa carrière à la Rodolfi Film.
Vicenzo C. Dénizot est l’un des nombreux français à avoir participé à l’explosion du jeune cinéma italien – mais il nous reste très peu de traces biographiques de lui. Acteur et réalisateur, il travaille en Italie du milieu des années 1900 à celui des années 20. Engagé par Itala Films, il y réalise Tigris (1913), thriller policier singulier qui connut un grand succès à l’international, et fut l’un des nombreux opérateurs de Cabiria, ce qui lui permit de co-réaliser plusieurs films de la série Maciste.
Italie / 1h07 / Imdb / DVD Autres titres : Maciste, L’Uomo Forte / Maciste il terrore dei banditi
Un musicien de rue s’installe entre deux immeubles… (film entier)
Pathé, avec Gaumont, fut l’une des plus imposantes sociétés des débuts du cinéma (en 1904, elle contrôle 30 à 50 % des films projetés dans le monde occidental). Ayant le quasi-monopole auprès du public de foires, elle produit énormément (parfois au détriment de la qualité), et participe très tôt, de par la diversité de son catalogue, à accentuer la découpe des films en « genres » ; elle pratique également une politique d’expansion par ses filiales à l’étranger ; et elle édite enfin les productions du « Film d’art », qui ouvrent le cinéma à un public plus bourgeois. Certains grands noms des deux premières décennies du cinéma travailleront chez Pathé : Albert Capellani, Ferdinand Zecca, Segundo de Chomón, ou encore Max Linder. La firme sera également célèbre plus tard pour ses actualités cinématographiques (le Pathé Journal, lancé dès 1908, deviendra très populaire dans l’entre-deux-guerre).
Le dixième d’une série de 21 films sur les usines de la société Westinghouse. (Film entier)
Billy Bitzer (1872-1944), de son vrai nom Gottfried Wilhelm Bitzer, est resté célèbre pour avoir été le chef-opérateur et proche collaborateur de Griffith. Sa passion pour les innovations techniques, et ses nombreuses trouvailles formelles (plans aux bords irisés, fondus au noir, lumière exclusivement artificielle, usage artistique du flou…), en firent le premier véritable « directeur de la photographie » de l’histoire du cinéma. Mais avant de rencontrer Griffith, il fut aussi réalisateur pour la Biograph, expérimentant et développant à travers ses films le style réaliste qui fera sa patte.
La Briograph (« American Mutoscope and Biograph Company ») est l’une des grandes sociétés de production des débuts du cinéma, et restera extrêmement prolifique jusqu’au milieu des années 10. Fondée en 1895 par William Dickson (le pionnier du cinéma américain, qui travailla d’abord pour Edison), on la retient surtout pour Griffith, son réalisateur principal. Mais elle fut aussi le berceau de nombreuses actrices majeures de la période (Mary Pickford, Lillian Gish, Blanche Sweet…).
USA / 0h02 / Imdb / DVD Titre complet : Westinghouse Works, Panoramic View Street Car Motor Room
Edwin S. Porter (1870-1941) fut l’un des grands pionniers du cinéma américain. Travaillant d’abord comme télégraphe, il garda toujours au cinéma un rapport de technicien, cherchant à améliorer caméras et projecteurs. Mais c’est en tant qu’innovateur de formes qu’il est resté célèbre. Engagé par les studios Edison, il s’inspire du cinéma de Méliès (pour la continuité narrative) et des innovations de l’École de Brighton (notamment leurs courses-poursuites). The Great Train Robbery, fruit de ces influences, sera un succès mondial. Quittant la société d’Edison en 1909, il crée la Rex Film Company, qui intégrera trois ans plus tard le consortium Universal.
La Edison Manufacturing Company, société New-Yorkaise, fut le berceau des tous premiers films américains, et la société de production la plus importante du pays durant les années 1900. Elle fut aussi le cauchemar des cinéastes de son temps : redoutable commercial, Edison cherche à écraser les productions indépendantes par la formation d’un Trust en 1908, qui réunit toutes les grandes maisons de production d’alors, épuisées par la guerre des brevets lancée par Edison depuis 1902. Il en résulta la fuite des indépendants à l’autre bout du pays, où ils s’installèrent – fondant ainsi Hollywood.
USA / 0h12 / Imdb / DVD Titre français : Le Vol du grand rapide
Suzanne et Raymond s’aiment. Mais sa mère, propriétaire d’une petite auberge, arrange un mariage pour sa fille avec un riche client…
Louis Feuillade (1873-1925) fut le directeur artistique de la société Gaumont, et son plus important réalisateur – tant par le nombre de films qu’il dirigea (près de 800) que par son influence. Difficile pourtant de définir le cinéma particulièrement éclectique de Feuillade, où le réalisme bourgeois sourde de relents plus irréels et fantasques, et où l’ambition esthétique se conjugue à des visées pragmatiquement commerciales. On peut néanmoins citer trois moments célèbres de sa filmographie : ses personnages d’enfants terribles (Bout de Zan, Bébé, Oscar), ses drames réalistes et moraux (série « La vie telle qu’elles est »), et surtout son talent pour les sérials et films policiers à épisodes (Judex, Fantômas, Les vampires…), qui comptent parmi les œuvres les plus emblématiques du cinéma muet.
La Société Gaumont, fondée en 1895, fut l’autre grand géant du cinéma premier aux côtés de Pathé – concurrent dont elle se démarque par une évolution plus lente, une production plus concentrée, mais aussi par un souci plus appuyé de qualité esthétique et de bienséance. Créant aux Buttes Chaumont le plus grand studio du monde (1905), et ouvrant une immense salle de cinéma à Paris (1910), Gaumont restera célèbre pour ses expérimentations techniques (sonores, chromatiques, animation), mais aussi pour la qualité de ses cinéastes : Alice Guy, Jean Durand, Léonce Perret, Victorin Jasset, et surtout Louis Feuillade. La guerre porte un coup d’arrêt à son expansion, et la production de films cessera temporairement en 1925, avec la mort de Feuillade ; mais la société perdurera à travers le siècle.